Il y a eu cette première journée sans eux. j’avais roulé la nuit. quatre cents kilomètres vers le Nord. un arrêt à Reims. l’hôtel. chic. peu de touristes. je prends un bain. en peignoir sur le lit je me selfise. mes cheveux d’un blond clair. grand sourire au fond des yeux mouillés. les enfants. respirer. il faut respirer. comment redonner du souffle à leur absence. comment accepter qu’une autre femme passe deux week-ends sur quatre avec eux. comment va t-elle les accompagner. pourquoi pas moi. respirer. les canapés devant la cheminée sont vides. je dîne. j’écris. je lis. respirer.
Le lendemain. arrivée à la mer quand la route devient bout du monde. je crie dans ma voiture. « la mer ». j’ai apporté leurs peluches. geste conditionné pour apprendre à symboliser. se rappeler le moment de souffrance exit l’incompréhension. réapprendre à parler. intensément. respirer de l’amour. un tout petit singe marron avec de grands yeux très ouverts et une bouche rieuse. un petit ours blanc à la même hauteur que le singe affublé d’une même bouche rieuse. installés sur le lit. je les emmène sur le balcon. je les photographie. face à la mer. je me selfise. dans mon hoodie gris. le teint la mer. les vagues l’écume. blanche. le ciel et l’eau en miroir de bleu discret, bleu éteint, bleu cervelle. cervelle. ne pas réfléchir. écrire. sur la jetée glissante promener mon corps. poser mes lunettes sur la table face à la Manche. respirer.
Ne pas penser. éteindre la cervelle dans mon cœur écorché. tenir. séduire ma nouvelle vie. boule à facettes. cœur étourdi. s’en va au fil des éléments. les brillants qui dansent se fichent de moi. C’est la vie qui passe avec mon hoodie dedans.
