C’est bien mon nom,
Automne?
Je ne sais pas.
Dites-moi, vous qui tombez comme des souvenirs !
Vous qui êtes en plein dedans,
là, maintenant.
J’ai toujours aimé l’Automne,
il rayonne par dessus les vallons,
c’est juste à cette période qu’on voit la collision du soir
avec l’étrange et le banal,
des ciseaux invisibles qui détachent les feuilles de la nuit,
les ennuis des jardiniers,
des forêts nues qui cachent leurs arbres,
pour distraire les regards épurés.
Un changement brutal plus austère,
captivant aussi,
comme un jour de grand vent,
découvre le petit matin,
ici.
Il est vivifiant,
il tient les vignes avec ses rayons,
et puis il voit passer les étudiants dans des bus embués,
que la rentrée rend fiers et ennuyés de grandir.
Je crois que je l’ai laissé me faire tourner la tête bien des fois,
j’aime le retour du frais,
du soleil qui se lève malgré la gelée qui le retient sous les draps,
de la nuit noire qui se fait plus entreprenante,
des radiateurs qui ont de l’air dans le ventre,
de l’année qui reprend bien avant le mois de janvier.
J’épie ses moindres faits et gestes,
mieux que ça,
je les vois sans le gêner,
je me fais écureuil et il chatoie.
Il parle aussi, laisse tomber des petits mots sur les tapis de mousse,
des lettres jaunes et oranges, des enveloppes de marrons,
déjà ouvertes.
Je lis la nature qui tombe dans un reste de fruits persistants,
je ne fais pas l’aumône,
j’ écarquille les yeux dans les champs,
et je ramasse des bouts de nous.
La terre commence à durcir,
déjà les matins ne collent plus,
elle tord les chevilles et dégage l’horizon
de sa franche brume épaisse.
C’est la terre qui dicte, siècles après siècles,
les phrases que l’on se répètera en marchant,
« Amen » n’est plus, mais on se penche toujours
sur les autres,
quand la saison vient à manquer de gants.
Les manteaux poussiéreux se laissent faire,
séduits à l’idée de retrouver les placards des entrées,
ils font partie de la famille!
Ils acceptent de sortir de nouveau,
ils sont tendres, en tout cas les premiers jours,
doux aussi et beaux.
C’est le moment de la passion pour eux,
ils tombent amoureux en octobre,
ils frissonnent comme des phares un peu endormis par l’été,
prêts à se couvrir pour l’hiver,
sans rancœur.
C’est leur plus belle preuve d’amour,
se revoir dans le doux matin blanc,
chaque fois nouveaux.
C’est la chance de l’Automne,
la seule saison qui ne demande rien,
et reçoit tout.